(à prononcer Lu-Keu)
Mes lectures oscillent entre romans noirs torturés et livres que l’on pourrait classer de manière très péjorative dans le rayon Développement personnel. Ces 2 types de lectures a priori antinomiques sont au contraire tout à fait cohérentes : je me rassure avec les aventures d’être tordus ou névrosés qui me démontrent que je ne suis pas si paumée. Et j’essaye de moins l’être avec des essais au contenu positif. C’est dans le cadre de ma quête de sérénité que je me suis plongée dans les 285 pages du Livre du Lykke (à prononcer Lu-Keu selon l’indication de l’éditeur français). Tour du monde du bonheur de Meik Wiking publié dans la collection L’optimiste chez First Éditions. Une révélation !
Voyage chez les cultivateurs du bonheur
Lykke signifie bonheur en Danois. Son auteur Meik Wiking est le directeur de l’Institut de recherche sur le bonheur de Copenhague au Danemark. Cet institut très sérieux effectue des recherches pour mesurer, comprendre et créer du bonheur. Meik Wiking a déjà publié en 2016 le livre du Hygge (prononcez houga) où il questionnait les habitudes qui font le bonheur des Danois. Surtout, il livrait les secrets de cet art de vivre célèbre dans le monde entier. Après en avoir vendu 50 000 exemplaires et été traduit dans 33 pays, ce spécialiste du bonheur revient avec un tour du monde des gens heureux. Car si le Danemark est certainement le pays où il fait bon vivre et où ses habitants cultivent le plus le bonheur, d’autres populations, communautés ont développé des moyens d’être heureux. Et ce voyage est tout simplement passionnant, inspirant, émouvant.
D’abord parce que l’auteur, contrairement à la majorité des livres de développement personnel, ne claironne aucune injonction. Pas de » arrêtez de fumer, de crier, de manger, de vous énerver ». Pas de » positivez, inspirez, méditez » ! Le Danois présente les dénominateurs communs du bonheur à travers des expériences de vie dans le monde entier et classés en 6 thématiques : être ensemble, l’argent, la santé, la liberté, la confiance et la bonté. Il explique que dans un rapport mondial sur le bonheur, 4 points séparent les pays les plus heureux des pays les moins heureux. Et 3 de ces points s’expliquent par ces 6 facteurs. L’auteur propose donc une sorte de carte au trésor du bonheur. Une présentation des causes et effets du bonheur pour améliorer sa qualité de vie.
Le bonheur, ça se mesure ?
Avant de rentrer dans le vif du sujet, Meik Viking a la bonne idée de répondre à une question pertinente : comment mesurer le bonheur ? Contrairement à une idée reçue le Pib par habitant n’est pas un miroir de la qualité de vie et donc du bonheur. Le Pib est un critère objectif alors que le bonheur reste subjectif. Alors comment déterminer, évaluer cet état si subjectif ? Il s’agit de mesurer le ressenti de chaque individu en comprenant le pourquoi de ce ressenti. Il existe plusieurs dimensions dans le bonheur : la dimension affective, c’est à dire l’émotion à l’instant T, notre quotidien. La dimension cognitive, c’est notre état de bonheur en général avec du recul. Et il existe une troisième dimension appelée eudémonie qui se base sur la perception du bonheur selon Aristote : une bonne vie est une vie qui a du sens et un but. Évidemment, ces 3 dimensions sont liées. Et l’Institut de recherche sur le bonheur étudie des sujets sur le long terme à travers ces différentes dimensions.
Être ensemble
Meik Viking démarre avec le premier pilier qui permet d’accéder au bonheur : être ensemble. C’est-à-dire le renforcement des liens, le sentiment de communauté. Les gens plus heureux ont un fort sens de la communauté, ils ont quelqu’un sur qui compter. Notamment, l’auteur cite l’exemple des Bo Faellesskabdes, communautés d’habitations indépendantes où chacun a sa maison mais propose en commun un jardin, une cuisine, une salle à manger. Ces communautés se sont multipliées à hauteur de 20 % ces 6 dernières années. Et elles n’existent plus seulement dans les pays nordiques mais aussi au Canada, en Australie, au Japon, en Allemagne, aux Pays-Bas et au Royaume Uni. Un mode de vie génial pour les enfants et les personnes âgées car il renforce le lien social et l’entraide. En bref, ça fait du bien a tout le monde et ça simplifie la logistique du quotidien !
L’argent ne fait pas le bonheur mais un peu quand même
Dans le chapitre sur l’argent, on imagine bien que selon le dicton, l’argent ne fait pas le bonheur. Mais ce n’est pas si simple. Car il y a une corrélation entre revenus et bonheur. Le problème se pose autrement. Epitecte, le philosophe stoïcien de la Grèce antique disait : « la richesse n’est pas de posséder beaucoup mais de désirer peu ». Dans cet ordre d’idée, L’auteur nous rapporte l’expérience de Michele Mac Gath, journaliste anglaise qui a passé une année sans dépenser une livre. Elle raconte dans son livre L’année sans achats qu’en dépensant moins elle a vécu plus. Elle est devenue plus aventureuse et plus heureuse.
L’auteur prend également en exemple la loi de Jante qui existe au Danemark mais également dans d’autres pays nordiques : cette loi qui signifie que « Tu n’es pas mieux que nous » est issue d’un roman écrit en 1933 par le Dano-norvégien Aksel Sandemose. Roman qui célèbre la critique de ceux qui ayant un statut social élevé se croient meilleurs. Concrètement, cette loi a pour objet de freiner la consommation ostentatoire avec par exemple une taxe voiture de 150 %. Cette loi réprime l’exposition de la richesse qui se révèlerait négative. Mais en y réfléchissant, il n’est pas tant question d’argent mais plutôt d’humilité. Finalement, rien ne vous empêche d’être riche si cette caractéristique ne conditionne pas votre manière de vivre et votre bonheur.
Ajoutez une pincée de santé, liberté, confiance et bonté…
Après le vivre ensemble, l’agent, l’auteur rapporte d’autres expériences à travers le monde qui expliquent les facteurs du bonheur dans le domaine de la santé, la liberté, la confiance et la bonté. Impossible de vous en donner un aperçu sans trahir la richesse du livre. Car à travers ces thématiques, il traite également de l’éducation, de la famille, du travail, de l’égalité entre les hommes et les femmes. Une véritable étude complète et sans frontière qui se conclue par un dernier chapitre : Assembler les pièces. Car toutes ces thématiques sont dépendantes les unes des autres pour augmenter sa qualité de vie.
Source d’inspiration
Le Livre du Lykke va bien au-delà du développement personnel. Toujours positif et sans juger, Meik Wiking a écrit une étude globale de modes de vie rayonnants. Des styles de vie dans l’ère du temps qui aspirent à la fois à plus de simplicité (modes de consommation, rythme de vie) et plus de richesse (empathie, partage, ouverture d’esprit). Mais l’intérêt du livre réside dans la multiplicité des démarches et de leur efficacité. À chaque lecteur de s’inspirer d’une expérience ou d’une idée pour l’adapter à son envie, ses moyens, sa réalité. Surtout ce livre permet de ne pas (trop) céder à la peur ou au cynisme face à notre monde anxiogène. Une fois la dernière page tournée, je n’ai pas fait mon paquetage pour aller vivre dans une communauté. Mais les bouffées d’oxygène et d’inspiration ressenties tout au long de la lecture m’accompagnent aujourd’hui dans mon quotidien. Et ça fait du bien.
Le Livre du Lykke, de Meik Wiking, 288 pages, 14,95 €, First Editions.
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