Un album jeunesse qui sent bon l’herbe fraîche !
Entre la pub télé d’un supermarché qui essaye de se racheter une conscience en expliquant qu’ils vendent du poulet sans anti-bio et le salon de l’agriculture (plus grande ferme ou foire de France ?) qui se tenait il y a peu à Paris, j’ai eu envie de vous parler d’un livre jeunesse sorti récemment. Un album qui sent le bon lait frais, l’herbe des pâturages, et qui rappelle le goût des choses simples : 1000 Vaches, de Adèle Tariel et Julie de Terssac, Éditions Père Fouettard. Une histoire à lire aux enfants dès 4 ans et à faire lire seul aux plus grands !
C’est l’histoire d’un fermier qui coule des jours heureux auprès de ses trois vaches. Il produit du bon lait qu’il a plaisir à échanger contre du pain ou des services. Ce métier lui procure à la fois de quoi vivre et le temps de profiter de la vie, bichonner ses vaches, voir ses amis. Quand un homme en costume arrive un matin à la ferme et trouve le lait délicieux, il l’incite à produire plus. Produire plus de lait, toujours plus. Donc avec plus de vaches, mais aussi de nouvelles machines plus performantes, des bâtiments plus grands. Pour satisfaire la demande grandissante des consommateurs enthousiastes. Mais ce passage dans le « toujours plus » bouleverse le quotidien du fermier et de ses bêtes.
Produire plus mais à quel prix ?
Cet album fait évidemment référence à La ferme des mille vaches, une exploitation bovine laitière industrielle, située dans le département de la Somme, en région Hauts-de-France. Un exemple malheureux de l’agriculture intensive. Surtout un modèle très controversé car il frappe par ses dimensions sans précédent en France. Ses opposants critiquent le fort impact de cette exploitation sur l’environnement.Une enquête publique est d’ailleurs en cours.
Ce livre jeunesse pose donc la question : produire plus, oui, mais à quel prix ? Et pas de n’importe quel manière. Cette question philosophique et sociétale qui aborde plusieurs thèmes comme la santé, le bien vivre et le respect de l’environnement est traité avec beaucoup de simplicité et d’humour. De simplicité grace à un ton innocent et descriptif. Adèle Tariel, l’auteur, raconte l’histoire de ce fermier embarqué dans l’agriculture intensive sans jugement, en décrivant seulement les conséquences pour lui, la nature ou les vaches. Une présentation de faits complexes mais avec des mots simples et sans prendre partie par une journaliste du média à destination des enfants Mon Quotidien. Avant 1000 vaches, Adèle Tariel a déjà scénarisé des albums aux éditions Ricochet, Kilowatt et Talents Hauts.
Faire réfléchir les enfants avec humour et poésie
Et l’auteur aborde ce sujet un peu compliqué et parfois triste avec humour et poésie. Le fermier par exemple aime tellement ses vaches qu’il leur donne des prénoms : Mariette, ginette et Georgette. Quand il en achète plus, encore et encore, il continue à leur trouver de jolis prénoms en « ette ». Mais la tâche se complique avec le nombre grandissant de vaches et il se met à trouver des prénoms de plus en plus étonnants : Grossestête, Perdlatête… Puis à court d’inspiration, il finit par leur donner des numéros. 1000 vaches est vraiment un bel album sensible et authentique sur la production raisonnée et le respect des animaux.
C’est aussi un album gai et coloré avec les illustrations de Julie de Terssac, une artiste illustratrice bordelaise. Des illustrations originales de dessins acrylique, collages, peinture, crayons, des traits ronds et suspendus un peu naïf. Un très joli album dans le fond et dans la forme, publié par les éditions Père Fouettard.
Un éditeur qui nous raconte pas d’histoires !
Fondé en 2014 dans le Bas-Rhin, cette maison d’édition jeunesse (dont le nom est tout une promesse !) veut voir les enfants » lire, rire, s’amuser, s’émerveiller, et surtout apprendre à réfléchir par eux-mêmes, à développer autonomie, responsabilité, respect sans oublier de rêver « . Une maison d’édition de livres jeunesse mais pas que lancée et tenue par des artistes du monde entier. Une belle illustration de la diversité de la production internationale, des histoires aux résonances universelles. Ils ont une démarche éthique de maison indépendante : une impression locale avec des matériaux non-agressifs pour l’environnement, et des conditions de travail respectueuses de l’humain. Pour offrir aux enfants des livres fabriqués proprement, près de chez eux, limitant notre empreinte écologique. Bref un éditeur qui nous raconte des histoires mais au sens propre pas figuré.
Manque plus que vous achetiez cet album chez un libraire indépendant et on sera bien 😉
1000 Vaches, de Adèle Tariel et Julie de Terssac, 32 pages, 13 €, Éditions Père Fouettard.